Je suis un citoyen ordinaire....quoique... !?
Je vous livre ici une expérience que j'ai vécue au plus fort de l'été 2008. Il faisait très chaud. Je ne savais pas dormir et j'ai eu envie de me promener seul dans les rues de mon village mais ...
Je suis un citoyen ordinaire....quoique... !?
Ces derniers jours, il fait chaud, très chaud, trop chaud pour vivre normalement.
Hier, jeudi trente-et-un juillet deux mil huit a été la journée la plus chaude de la semaine.
J’avais l’impression que j’allais faner telle une plante qui manque d’eau.
La nuit, les murs des maisons restituent la chaleur emmagasinée pendant la journée.
Dans les chambres, l’air est moite, irrespirable.
Dans ces conditions, il est difficile de trouver le sommeil. Alors, la nuit dernière, celle du premier au deux août 2008, j’ai décidé d’aller là où il fait bon vivre : dehors.
Je suis allé marcher dans le jardin.
J’étais nu-pieds.
Il n’y avait aucune rosée : l’herbe était totalement sèche.
Les poules dormaient dans le poulailler tandis que les trois oies, disposées en triangle, surveillaient alentours.
Il faisait extrêmement noir, la couverture nuageuse était basse.
Il n’y avait aucune lune dans le ciel et aucun bruit au dehors.
La légère brise était délicieuse et la température, superbement agréable.
Encore meilleure que la nuit précédente que j’avais passée dehors, dormant sur un transat jusqu’à l’aube.
Ces derniers jours, j’ai peu de contraintes au niveau de mes horaires. Alors, j’ai décidé d’aller me promener dans le quartier.
Il était près de deux heures lorsque j’ai refermé la barrière du jardin derrière moi.
J’étais vêtu d’un short et d’un tee-shirt de couleur claire, j’avais des sandales aux pieds et j’avais pris la précaution d’emporter mon portefeuille et ma carte d’identité...
Je n’avais pas envie de me retrouver dans le noir, perdu au milieu des champs et des chemins de remembrement mais j’avais seulement envie de marcher dans les rues désertes du village.
Au lieu de monter tout droit vers les champs d’où venaient les bruits des monstres agricoles, j'ai décidé d'aller dans la venelle, à gauche, derrière chez moi. Les agriculteurs travaillent toute la nuit afin de terminer la moisson avant l’arrivée des orages.
La nuit, tous les chats sont gris…. Sauf le mien (NDRené : depuis lors, il est remonté au ciel et un autre m'accompagne au quotidien) qui, jour et nuit, est toujours blanc avec une queue couleur chocolat. Il a cheminé une minute avec moi mais il s'en est vite retourné jouer avec sa Belle.
La nuit, tout est différent. Les ombres sont celles créées par les sources de lumière artificielle. Le monde de la nuit est différent même s’il est constitué des mêmes gens.
Je me souviens quand j’étais jeune gendarme à Bruxelles au début des années quatre-vingts, j’adorais patrouiller la nuit. J’ai toujours aimé vivre la nuit. La nuit, je suis dans mon élément. C’est mon ambiance, c’est mon chez moi et aussi, j’adore photographier les lumières de la nuit.
Je marche donc sans bruit dans cette venelle à sens unique qui mène de chez moi à l’école primaire du village. Je respire avidement les odeurs de la nuit, le parfum des massifs de fleurs et des arbustes qui bordent les maisons.
Arrivé à hauteur de l’école, je tourne à droite et je commence à monter l’allée qui mène vers le hall des sports et l’extérieur du village, à la limite des champs.
Mais, que fait donc cette voiture foncée dans la cour de l’école ? Surtout aussi tard dans la nuit. Je m’approche et je l’examine et ne décèle rien de spécial.
Par contre, il y a de la lumière dans une salle de classe du rez-de-chaussée mais il n’y a aucun bruit et aucune ombre ne passe derrière les rideaux. Apparemment, la porte d’entrée de l’école ne porte aucune trace d'effraction.
Je m’approche des fenêtres pour regarder à l’intérieur de la classe mais tout à coup, je vois une lumière orange qui clignote sur la façade du bâtiment principal de l’école : l’alarme silencieuse a été déclenchée.
Est-ce à cause de moi, pensais-je ?
Non car je ne suis pas dans l’enceinte de l’école et je n’ai touché à rien.
M’intéresser à tout ce qui me paraît inhabituel ou suspect est totalement naturel pour moi. J’ai été formé pour déceler et intervenir en pareilles situations. Affronter le danger a été mon métier pendant trente ans.
Mais il y a trois ans, je me suis élevé contre ma hiérarchie. Surtout contre un vilain bonhomme en particulier; j’ai porté plainte à sa charge pour menaces et harcèlement moral. Quelques années plus tard, cette procédure m’a éclaté au visage et j’ai été viré comme un malpropre le quinze mai deux mil sept. Tout est expliqué dans cet article.
Depuis lors, je ne suis plus porteur de cette petite carte de banque de couleur orange avec le drapeau belge et la mention "Police Judiciaire Fédérale" qui m’autorise à avoir certains réflexes et à être considéré, dans mon pays, comme un citoyen au-dessus de tout soupçon.
Alors… la nuit dernière, je ne me suis pas approché de la fenêtre de la classe où il y avait de la lumière. J’ai fait demi-tour et je suis retourné me fondre dans l’ombre protectrice de la nuit.
Par cette nuit d'été terriblement noire, j’ai fui les éventuelles questions qu’un policier poserait au rôdeur que je pourrai être... à ses yeux.
Dans les ténèbres de cette douce nuit d’été, je suis allé marcher sur les chemins qui traversent les champs. Ma promenade solitaire a été bercée par le ronronnement des monstres agricoles qui moissonnaient au loin.
Ensuite, je suis revenu chez moi en étant attentif à ne faire aucun bruit, à ne pas me faire voir et n’éveiller l’attention d’aucun animal domestique au sommeil léger... Et je ne me suis pas renseigné pour voir s'il y avait eu un problème dans l'école communale durant cette nuit-là.
Il me faudra encore un peu de temps pour intégrer l’idée que maintenant « je suis un citoyen ordinaire… quoique…. !? ».
René Dumonceau
Publié le 26/10/2008. Mis à jour le 24/05/2017.
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